CHRONIQUES

TRIBUNE DU VENDREDI N°145 : Une tribune pour nos braves épouses

today19 juillet 2024 75 2

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Une tribune pour nos braves épouses

En tant que médiateurs sociaux, nous recevons plusieurs fois des femmes de tout âge qui viennent nous parler de leurs problèmes de couples dans l’espoir de recevoir une solution heureuse ou des conseils avisés. Cela nous a permis de constater toute la souffrance que vivent la plupart de nos mères et sœurs. Mais aussi la méchanceté de certains hommes qui, après avoir volé à leurs épouses leur jeunesse, leur beauté et leur temps n’hésitent plus à les trahir, les reléguer au second plan, les délaisser voire les jeter au rebut tout simplement au profit de jeunes femmes plus attirantes à leurs yeux. Ils oublient alors, tout ce que la première épouse a quitté pour se lier à eux ainsi que tous les sacrifices qu’elle a consentis pour s’occuper de lui et sa famille, les nourrir et éduquer leurs enfants pendant tout ce temps. Malheureusement, parmi ce lot de maris injustes il y a des hommes dits « ordinaires » mais aussi des hommes de religion.

C’est cela qui nous a poussé à aborder cette triste question pour mieux sensibiliser les maris sur tous ces torts et préjudices qu’ils font à leurs épouses consciemment comme inconsciemment et qui, un jour, pourrait les mener en enfer.

Aux premières lueurs de l’aube, elles se réveillent pour effectuer les premiers travaux ménagers de la journée pendant que la plupart des hommes sont encore éhontément dans les bras de Morphée. Certaines de ces braves dames, après avoir fini ces tâches ménagères, ne retournent pas au lit pour se reposer. Au contraire, elles parcourent des kilomètres pour aller travailler en ville ou dans les marchés afin de rassembler de quoi cuisiner au moins un repas pour leurs maris et enfants respectifs. Pour celles qui sont au village c’est encore plus difficile car elles parcourent ces kilomètres à pied ou à dos de cheval ou d’âne. Si ces fées du logis ne le font pas, aucun repas ne sera cuisiné pour la famille. Ainsi, sous le froid matinal comme sous le soleil de plomb de la journée d’été, ces plus que reines ne montrent aucun signe de fatigue ou de désespoir. Elles camouflent le poids de leur fardeau quotidien en gardant le sourire du « soutoura » dans l’espoir de voir un jour leurs enfants jouir de la réalité du « ligééyu nday añub doom ». Elles n’ont ni le temps de manger suffisamment, ni de s’habiller correctement.

La plupart d’entre elles ont des maris à la retraite ou qui sont au chômage ou qui n’ont pas assez de revenus pour nourrir leurs familles ou qui sont tout simplement des bons à rien. Il y en a même dont les maris sont de jeunes hommes à la fleur de l’âge, qui n’ont pas encore trouvé de travail et ne font rien pour en trouver. Car ils sont sûrs que leurs épouses dévouées se chargeront des dépenses familiales à leur place. C’est cela qui a motivé ces braves dames à s’armer de force et de courage pour les soutenir et les soulager des charges familiales devenues trop pesantes. Aussi, n’ont-elles aucun complexe pour travailler comme domestique ou lingères dans les cités ou en ville. La plupart sont des vendeuses de poissons, de légumes et condiments divers ou encore de repas dans les marchés et places publiques. Ce sont les bénéfices tirés de leurs activités qui leur ont permis de payer toutes seules tous les frais liés à la maternité et au baptême de chacun de leurs enfants. Car au moment d’accoucher, leurs maris n’avaient même pas un rond pour payer les frais d’hospitalisation.

Plus tard au moment de la cérémonie du baptême, c’est encore elles qui paient toutes les dépenses pour sauver leur honneur d’abord, et celui de la personne qui leur sert de mari ensuite. Ainsi, comme dans la société sénégalaise, les épouses et leurs familles respectives doivent faire des cadeaux en guise de « téranga » et autres fantaisies appelées « yebbi » à la famille du mari à chaque nouvelle naissance, elles se débrouillent encore pour réunir une coquette somme tirée des soutiens reçus de leurs parents proches et aussi des tontines auxquelles elles ont versé des cotisations régulières depuis longtemps pour préparer le financement d’une telle occasion.

Pourtant, la plupart de ces maris qui ne parviennent même pas à assurer la dépense quotidienne encore moins leurs devoirs familiaux n’hésitent jamais à maltraiter leurs épouses et les humilier au quotidien. Entre paroles grossières, tapages en tous genres et même abandon du domicile conjugal au profit des « gran’place », ces bons à rien ingrats ne se privent jamais de faire vivre un calvaire à la mère de leurs enfants (parfois si nombreux), à leur retour à la maison après une journée de labeur assez éprouvante. Le plus triste encore est qu’ils sautent tous sur la première occasion pour prendre une seconde épouse et ajouter encore plus de charges à leurs épaules d’hommes indigents. Et le pire dans tout est qu’ils prennent comme épouses de jeunes femmes bien moins âgées que leurs premières épouses. Parfois même, elles ont l’âge de leurs filles nées du premier mariage.

Cela crée beaucoup de frustration et déception dans la famille mais surtout dans le cœur de leurs braves premières épouses qui ont tout sacrifié, vendu tout leurs bijoux en or et argent pour sauver l’honneur de leurs chers maris. La plupart du temps, ce sont ces épouses et leurs parents qui ont payé tous les frais liés au baptême de chaque enfant né du couple. Se sentant la plupart du temps trahies, humiliées et bafouées, elles ne quittent pas pour autant le foyer conjugal. Elles vont encore rester et continuer à supporter les humeurs du mari indélicat, à subvenir aux besoins de la famille, à nourrir leurs enfants, à les vêtir et à payer leurs frais de scolarité. A l’occasion des fêtes comme la Korité, elles se débrouillent pour acheter de nouveaux vêtements à leurs maris sans même recevoir un seul mot ou acte de reconnaissance de leur part. Pendant la Tabaski, la plupart elles achètent le mouton à leurs maris respectifs, de même que des habits et ceux des enfants pour la cérémonie.

Pendant ce temps, ces derniers les délaissent de manière ingrate et impitoyable au profit de la nouvelle et jeune épouse aux cotés de qui ils préfèrent passer le plus de temps. Tout ce qu’ils ramassent comme revenu accessoire, ils les donnent aussitôt à la seconde épouse oubliant complètement la première et leurs enfants. Ces derniers, complètement laissés à leur sort, devront désormais faire sans ce père devenu un fantôme à la maison. Ce type de mari peut aller jusqu’à faire toute sorte de tapage pour pousser la première épouse à réagir afin de se donner une occasion en or de la répudier oubliant tous les enfants nées du mariage. Or, ce comportement de la plupart des hommes de tout âge envers leurs épouses contrastent avec l’enseignement islamique. En effet, en instituant le mariage, Allah veut que l’homme et la femme soient des partenaires unis, solidaires et complémentaires. Il dit dans le Coran : « Et parmi Ses signes, Il a créé de vous, pour vous, des épouses pour que vous viviez en tranquillité avec elles et Il a mis entre vous de l’affection et de la bonté. Il y a en cela des preuves pour des gens qui réfléchissent » (Sourate Ar-Rum, 21)

Allah a donné le leadership dans le mariage au mari pour la simple raison qu’il a des devoirs à accomplir et une responsabilité aux côtés de son épouse. A ce propos, le Coran dit : « Les hommes ont autorités sur les femmes, en raison des faveurs qu’Allah accorde à ceux-là sur celle-ci, et aussi à cause des dépenses qu’ils font de leurs biens. » ( An-Nisaa, 34)

S’il en est ainsi, comment comprendre qu’un homme qui est inapte à accomplir son devoir conjugal, puisse-t-il se comporter aussi insouciamment avec son épouse, la mère de ses enfants ?
Les hommes d’aujourd’hui prennent plusieurs épouses sans remplir correctement leurs devoirs envers elles. Pourtant, quand bien même Allah donne à l’homme la liberté de prendre plusieurs épouses jusqu’à un total de 4, Il a fixé des règles à respecter comme le prouve ce verset : « Il est permis d’épouser deux, trois ou quatre, parmi les femmes qui vous plaisent, mais, si vous craignez de n’être pas justes avec celles-ci, alors une seule, ou des esclaves que vous possédez. Cela afin de ne pas faire d’injustice (ou afin de ne pas aggraver votre charge de famille) ». (An-Nisaa, 3)

Or, être juste et équitable envers ses épouses même s’il n’est pas impossible au mari aussi, force est de reconnaitre qu’il lui est très difficile. A la lumière de ce précédent verset, il apparait clair que la majorité des hommes sénégalais qui se permettent de prendre plusieurs épouses n’ont pas suivi la recommandation du Tout-Puissant en ce sens que même avec une seule épouse ils ne parviennent pas à assurer les repas quotidiens encore moins à la vêtir et la loger. Pourtant ils n’hésitent pas à en prendre d’autres pour le plaisir et à les laisser se débrouiller toutes seules pour se nourrir et nourrir leurs enfants respectifs. Tout récemment, j’ai interpelé un de mes neveux trentenaire moi sur le fait qu’il ne ce soit toujours pas encore marié, il me répondit : « Si je devais prendre une épouse dans les mêmes conditions que la plupart des jeunes de mon âge – c’est-à-dire en ne fournissant aucun effort pour assurer ses charges et pour remplir pleinement le devoir conjugal – j’aurai pu avoir, à ce jour, quatre femmes déjà ».

Autre chose encore à souligner pour mieux conscientiser nos frères et nous-mêmes, c’est la responsabilité du père de famille sur son épouse ou ses épouses et chacun de ses enfants. A ce propos, le saint-maitre Seydina Limamou Lahi (asws) après nous avoir recommandé de nous occuper de nos familles a rappelé le hadith suivant : « Chacun de vous est un berger (autrement dit chacun est responsable de ce dont il est le gardien). Or, au Jour de la Résurrection, il sera demandé à chaque berger des comptes sur tout ce qui était sous sa responsabilité…Au père de famille, on demandera des comptes sur sa famille ».

C’est pourquoi, Seydina Limamou Lahi (asws) ajouta encore : « Je vous recommande donc le bon accomplissement de vos devoirs familiaux. Un père de famille défaillant sera accusé par les membres de sa famille devant Dieu le Très Haut. Ils diront « ô notre Dieu, celui-là était notre chef, mais il ne nous a jamais conseillé d’adorer Dieu, prends donc sur lui les préjudices qu’il nous a ainsi causés ». On évaluera alors l’étendue des préjudices, et l’on déduira le tout de la somme des biens qu’il possède. S’il n’en possède pas, on puisera sur les péchés des membres de sa famille une quantité équivalant aux préjudices, pour l’ajouter à ses propres péchés ». Si les membres de sa famille en arrivent à cela, c’est à cause de l’aveuglement et de la frayeur qui les frappent, à la vue de l’enfer, de ses supplices, de ses flammes et étincelles, tandis qu’ils ne savent pas comment en être sauvés. Voilà pourquoi, on prélève sur le père de famille les préjudices résultant du fait qu’il n’a pas conseillé ou éduqué les membres de sa famille. De même, des femmes diront « ô mon Dieu, celui-là était mon mari sur la Terre. Il me battait pour m’imposer le respect de son lit. Il ne m’a jamais battue pour manque d’obéissance à Dieu et à son Envoyé, ou pour manque de pratiquer les prières, le lavage rituel, les ablutions et le jeûne. Il ne m’a jamais interdit la danse, les chansons frivoles, le bavardage et les injures. Ô mon Dieu prend sur lui les préjudices qu’il m’a ainsi infligés ». Les fils diront aussi : « ô notre Dieu, prends sur notre père les préjudices qu’il nous doit : il ne nous avait pas donné un nom qui figure parmi les noms des saints, il ne nous a pas éduqués, il ne nous a rien fait savoir du Livre de Dieu ; il ne nous avait pas interdit ce que Dieu interdit; il ne nous avait pas conseillé la pratique des commandements de Dieu il nous avait abandonnés, et nous avait laissés l’entière liberté de faire le Mal, ô Dieu prends donc sur lui les préjudices qu’il nous a infligés ».

Aujourd’hui, en réétudiant la situation familiale à notre époque et sous nos cieux, l’on peut se rendre compte qu’aucun père de famille à l’heure actuelle n’est à l’abri de ces motifs de dénonciation qui pourraient être brandis par les épouses et les enfants pour l’enfoncer au Jour du Jugement. Ces préjudices que les hommes mariés font à leurs épouses surtout les premières) dans le mariage si elles ne le leur pardonnent pas, les mèneront inexorablement dans les flammes de la Géhenne.

Alors, la question qui doit nous interpeler tous est de savoir comment un homme qui a été informé de tout cela puisse-t-il prendre le risque de réunir plusieurs épouses à la fois et avoir plusieurs enfants tout en négligeant les devoirs et la responsabilité que cela implique ?

Wassalâmun anla man itabihul Hudaa.

Chérif Alassane Lahi Diop « Sibt Sâhibou Zamâne »,
Analyste politique et économique,
Expert en Commerce et Management des Affaires Internationales,
Secrétaire Général de Vision 129.

Écrit par: soodaan3

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